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Les non-dits désignent des choses qui ne sont pas exprimées, qui sont cachées, ou implicites dans le discours d’un coaché. Exprimer les non-dits est une pratique vertueuse pour générer une bonne compréhension des objectifs de nos clients.
Michel est membre d’un Codir. Lors de la dernière réunion, il a eu envie de dire franchement à son patron sa frustration concernant son manque de prise de position claire de celui-ci sur le projet de conduite du changement. A côté de lui, un autre directeur s’impatientait sur sa chaise et ils ont échangé quelques regards. Ils pensaient la même chose. Mais ni lui, ni Michel n’ont rien dit. Rien ne s’étant amélioré dans les semaines qui ont suivi, Michel a décidé de trouver un prétexte pour ne pas assister à la prochaine réunion.
Ce scénario peut se répéter longtemps. Faut-il que Michel s’exprime au cours de la prochaine réunion, au risque de se mettre en porte-à-faux par rapport à son patron et les autres membres de l’équipe qui n’interviennent pas non plus ou a-t-il raison de ne rien dire ?
L’avis du coach : Probablement pas, car il souffre encore de la situation inchangée mais le non-dit exerce un véritable pouvoir dans le système. En même temps qu’il le protège, il en maintient le statu quo ou homéostasie. Mais lorsque cela est bien exprimé et entendable, le non-dit libère de l’inertie et rend au coaché de l’influence sur les situations.
Exprimer un non-dit est un exercice délicat comme le montre cet exemple car il remplit une fonction. Il permet de préserver des équilibres parfois acquis de longue date, il a un rôle protecteur des personnes et des fonctionnements. Il peut être légitime, voire utile, de le respecter. Ce n’est pas forcément un manque de courage que de ne rien dire. Peut-être n’est-ce pas le bon moment ou le bon lieu ? Un dirigeant peut ainsi avoir de bonnes raisons de ne pas soulever un non-dit en réunion car il connaît les équilibres à tenir au sein du collectif.
Dans certains cas, il peut même s’avérer contre-productif de verbaliser un non-dit. Comme il s’agit de mettre sur la table quelque chose qui est “en-dessous”, cela peut être violent et donc rejeté par le N+1 ou le groupe, qui n’est parfois pas prêt à entendre ou qui ne veut rien changer aux équilibres établis.
Ceci étant, l’expérience montre aussi qu’il y a une autre raison qui peut conduire à ne pas expliciter. C’est quand on ne sait pas comment s’y prendre. C’est là qu’intervient le rôle du coach en séance. Clarifier l’objectif de son client : ne pas s’exprimer ou s’il souhaite s’exprimer, comment faire ?
Dans le quotidien d’une vie d’équipe, ils sont très courants. Il y a d’abord, des phrases non finies : « Notre réunion était… enfin, je veux dire, intéressante ». Puis, des hésitations, des mots valises : « Notre problème c’est la communication ». Ou des expressions floues « Sur ce point, je suis en réflexion », des propos allusifs : « Ah, c’est comme d’habitude… », des sous-entendus : « Demande à David, il sait, lui », des silences etc.
Ensuite, le non verbal parle. A travers un regard évasif, une voix hésitante, un geste de rejet … Il s’agit donc de se rendre attentif aux signaux d’incohérence entre ce qui est dit et l’attitude de celui qui parle. Ce qu’on appelle la congruence. Une incohérence est souvent la manifestation d’un non-dit. Enfin il faut aussi s’écouter soi-même. « Qu’est-ce que je ressens, que se passe-t-il pour moi pendant que les autres parlent ? S’agit-il seulement de moi, qui suis fatigué ou facilement agacé ? Ou bien mon ressenti a-t-il quelque chose à voir avec ce qui est sous-jacent dans la discussion ?» Une fois les non-dits identifiés, il faut les reformuler.
Pour cela, avec mes associés, nous avons pour habitude de poser des lignes de conduite. L’une d’elles consiste à chercher les bonnes raisons de ce que dit, fait et pense l’autre. Elle invite à ne pas interpréter hâtivement et à rester dans une attitude d’ouverture positive.
C’est ce que pourrait faire un client, confronté au silence de ses collègues, face à l’annonce du retard d’un projet. « Et vous, qu’en pensez-vous ? ». La question invite à s’exprimer, à en dire plus, elle n’est pas agressive. Pour qu’elle soit engageante, elle requiert d’être ouverte et peu directive.
Dans notre exemple, Michel qui déplore le manque d’engagement du directeur général sur son projet mais ne sait comment s’y prendre pour l’interpeller, pourrait par exemple lui dire. « J’ai du mal à avancer sur le projet car je suis toujours en attente d’orientations de votre part. Quand pourrions nous fixer une réunion pour en convenir ? » Le plus important ici est de se garder d’interprétations abusives et de se contenter de poser le problème. Cette reformulation offre en plus au Codir une opportunité de prise de conscience qui peut s’avérer importante pour la suite.
En conclusion, exprimer les non-dits peut changer la donne et permettre de trouver des solutions là où l’on patinait depuis des semaines. Cet exercice peut paraître difficile et périlleux pour nos coachés. Afin de s’affranchir de la pression, il faut donc travailler avec eux leur assertivité car il ne s’agit pas de « tout dire » mais bien de formuler un ressenti ou une incongruence qui met mal à l’aise. Exprimer les non-dits peut au final créer une vraie différence dans une équipe, envers son N+1 ou dans le cas d’un projet de changement.
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